L'expérience est une lanterne attachée dans notre dos, qui n'éclaire que le chemin parcouru. [pv Demetra]

S

ur le papier, toute association éventuelle entre Pandora Skyler et Demetra Zabini, peu importe la nature de cette dernière, avait de quoi faire doucement rire. En dehors aussi, d'ailleurs. Les deux jeunes femmes n'avaient pas grand-chose en commun, elles ne se ressemblaient presque sur aucun point. Elles n'avaient absolument pas les même conviction, les mêmes valeurs morales, les mêmes... façons de voir la vie en général, et pourtant, Pandora appréciait la compagnie de sa camarade... Ou disons plutôt qu'elle appréciait ce qu'elle acceptait de lui montrer d'elle, ce qui était forcément très différent de qui elle était en soi.

C'était comme pour Severus, elle appréciait qu'ils mettent en commun leurs connaissances et leurs compétences, mais elle ne cherchait pas à connaître de lui les aspects de sa personnalité qui auraient pu l'intimer de s'éloigner de lui... De même, elle ne savait pas grand chose de Demetra... et au fond refusait d'en savoir plus que ce dont elle avait besoin. Elle avait trouvé chez la jeune femme une curiosité naturelle pour ses expériences qu'elle avait apprécié, et elle n'avait pas cherché plus loin.

La concoction de philtres d'amour n'était pas forcément l'activité que Pandora trouvait la plus stimulante. Elle ne trouvait pas vraiment d'intérêt à ce genre de préparation, d'une part parce qu'elle n'en avait pas l'usage - non pas qu'elle ait un succès fou, mais toutes ces considérations lui passaient un peu au-dessus de la tête, pour tout dire - et d'autre part parce que de nombreuses percées avaient été faites dans ce domaine sans forcément qu'il soit nécessaire qu'elle y mette son grain de sel à son tour. Mais elle restait tout de même curieuse... Surtout parce qu'on parlait d'influencer chimiquement des sentiments, et ça, c'était une chose qui la fascinait. Le procédé l'intéressait bien plus que le résultat, et elle se disait qu'il en était de même pour Demetra... Après tout, Demetra Zabini était très belle, et les garçons avaient plutôt tendance à lui tourner autour très naturellement, alors... Enfin... ses motivations pouvaient bien être ce qu'elles voulaient. En attendant, elles se trouvaient des occasions de jouer aux apprentis-chimistes ensemble, et Pandora aimait ça.

Elle attendait la vert et argent dans le cachot inutilisé qu'elle avait plus ou moins établi en QG au vu du temps qu'elle passait à cet endroit. Elle était en train de rassembler les ingrédients qu'elle avait l'intention de tester pour cette expérience quand elle entendit des pas approcher. Pandora leva ses grands yeux vers Demetra et lui adressa un sourire.

-Tu es pile à l'heure.

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A

mour… Une arme, un idéal, un mot vide de sens tant qu’on ne l’avait pas vécu. Demetra était fascinée par l’amour, et tous ses dérivés –le désir, la possession, la haine… L’amour était fascinant, oui, assez pour sortir l’adolescente de son oisiveté habituelle pour aller presque se salir les mains. Tout ça pour, soi-disant, l’amour.

C’était aussi pour cela qu’elle s’associait avec une personne qu’elle n’aurait jamais fréquenté en tant normal. Si ses parents savaient qu’elle « s’acoquinait » avec d’autres que les noms sur sa longue liste de sang purs et autres cibles d’influences... Pandora n’avait, selon les critères des Zabini, rien d’intéressant. Mais les critères personnels de Demetra étaient plus fins et plus ambitieux, pensait-elle. Et Pandora, aussi excentrique soit-elle, avec des capacités dignes d’intérêt sur le court comme long terme. Elle était utile et c'était l'important.

Après s’être soigneusement préparée dans son dortoir –elle ne mettait jamais les pieds hors de sa chambre sans de minutieuses et longues préparations, car Demetra Zabini ne pouvait être autre chose que parfaite, au grand désespoir des autres filles de son dortoir, toujours à faire la queue devant la porte de la salle de bain- elle part un peu en avance pour son rendez-vous pas comme les autres. Pourquoi une fille nonchalante comme Demetra, vous demanderiez-vous, prendrait la peine de partir en avance ? C’était le revers du succès qui voulait ça. Demetra était populaire, Demetra était convoitée, et on s’adresser à elle, on essayait d’attirer son attention, de baigner dans son aura de succès et de beauté (c’était en tout cas ce qu’elle aimait croire, et ce qu’elle visait dans la vie). Alors son chemin dans la salle commune, puis les couloirs, est parsemé d’interruptions pour diverses raisons, sans intérêt pour la plupart, mais il fallait bien donner au peuple de quoi se réjouir.

Elle arrive dans les cachots pile à l’heure, comme la Serdaigle aux cheveux blonds platine le lui fait remarquer. Demetra sourit et accroche sa cape de sorcière au porte-manteau.

« Bien évidemment, je ne voudrais pas faire attendre ma comparse favorite. » minaude-t-elle, et ce n’est pas vraiment vrai, pas vraiment honnête, c’est une déformation de tous ces mensonges qu’elle tisse constamment… Même si elle le voulait, elle ne saurait pas être honnête.

Demetra, les cheveux attachés en un chignon soigné (depuis qu’une éclaboussure de potions lui avait coûté quelques-unes de ses mèches, elle prenait garde) et s’approche du bureau ou étaient entreposés un certain nombres d’ingrédients. « Quel est le programme du jour ? » Parce qu’il ne fallait pas rêver non plus, Pandora faisait le gros du boulot. Demetra restait une feignante, qu’importe son intérêt… Mais elle n’était pas non plus complètement inactive. L’un de ses buts était d’être capable, plus tard, de concocter ses propres recettes. Pas qu’elle pense avoir besoin de philtres d’amour –elle aimait l’idée de pouvoir les charmer d’elle-même- mais qui sait quel genre de breuvages elle aurait besoin de concocter dans le futur…

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P

andora n'y croyait pas réellement quand Demetra affirmait qu'elle était sa comparse favorite. Elle était souvent dans la lune, mais elle n'était pas pour autant née de la dernière pluie, elle savait parfaitement ce qu'était la nature de leur relation, et ça lui convenait très bien. Elle savait très bien qu'en dehors de ce cachot, elle n'existerait pas pour la vert et argent, comme elle n'existait pas pour beaucoup d'autres gens, et ça lui allait très bien. De toute façon, Demetra non plus n'était pas sa "comparse favorite".

Elle avait déjà un comparse favori, et c'était Xeno. Peu importe, elles n'étaient pas là pour se flatter mutuellement ou se caresser dans le sens du poil, elles étaient là pour expérimenter, collaborer et donner le meilleur d'elles-mêmes. Et c'était précisément ce qu'elles allaient faire. Demetra était motivée, très motivée, même, ça se voyait, et donc, elle était dans le parfait état d'esprit, c'était tout ce qui comptait.

-Eh bien, tout dépend de toi, répondit Pandora avec un sourire enthousiaste aux lèvres.

Elle avait hâte de s'y coller. Elle n'avait rien contre Demetra, quand on faisait fi dans ses grands airs, elle trouvait même qu'elle était plus intéressante que ce qu'on pourrait s'imaginer et elle avait depuis longtemps levé ses a priori la concernant. Mais ce n'était quand même pas pour papoter avec elle qu'elle lui consacrait de son temps, c'était uniquement parce qu'elle lui permettait de pratiquer une activité qu'elle adorait, et dans laquelle elle se donnait complètement à fond, corps et âme.

-J'ai rassemblé le plus d'ingrédients possibles. On peut partir sur de nouveaux essais de philtres d'amour, je suis sûr qu'on est à deux doigts de trouver un mélange qui ferait passer l'amortentia pour un bain de bouche sans intérêt. Mais si tu as envie de t'essayer à autre chose, ça peut se faire aussi.

Pandora était ouverte à toutes les possibilités. Tout ce qui comptait pour la bleue et bronze, c'était de créer, d'inventer, de chercher... Elle avait à sa disposition tout un tas d'ingrédients qu'elle n'avait pas encore envisagé de mélanger entre eux, elle ne demandait qu'à essayer, et réessayer, et essayer encore... quitte à faire fondre un ou deux chaudrons dans le processus.

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D

emetra était trop individualiste pour vraiment s'attacher aux autres, sauf quelques exceptions... qu'elle ne se gênerait néanmoins pas de trahir si c'était à son avantage. Il fallait ce qu'il fallait pour réussir et sortir sa baguette du jeu. La jeune sorcière était tout à fait consciente qu'elle vendrait père et mère s'il le fallait. Elle était une gagnante, et les gagnants étaient réalistes.

Mais passer du temps avec Pandora Skyler n'était pas tant un sacrifice que cela. Certes, elle n'avait pas de sens de la mode (si elle avait eu une vie inintéressante, elle lui aurait bien proposé quelques conseils de look, mais évidemment elle avait d'autres priorités), était un peu étrange, mais elle n'était pas désagréable. Et surtout, elle était vraiment brillante. Alors Demetra pouvait prendre sur elle, dépasser ses préjugés et supporter de se salir les mains... Plus ou moins.

Et puis, l'enthousiasme de la Serdaigle était communicatif. Demetra ne comprenait pas tout ce qui se passait dans son esprit alambiqué, mais elle avait confiance en ses capacités. En tout cas il était sûrement plus agréable de magouiller avec elle qu'avec Severus Rogue... Que ce soit visuellement ou moralement. Non, Demetra ne pardonnerait jamais la manière dont il l'avait envoyé sur les tentatcula véneuses... Elle ! Il aurait du être flatté qu'elle lui accorde une once d'attention. « J'aime ton ambition. Allons, dépasser le plus grand des philtres d'amour ? Je suis pour ! » Même si ça lui semblait un peu dangereux, tous ces ingrédients qui les attendaient... Elle avait prévu un équipement protecteur, pour éviter un accident du style de celui qui lui avait coûté des mèches.

Et puis, elle voulait encourager Pandora à créer... A créer, quelque chose d'assez intéressant pour être commercialisé. Quelque chose qui pourrait lui rapporter des galions dans le dos de sa camarade trop obsédée pour voir plus loin que la création... Si Pandora était l'artiste, Demetra aimait se voir comme la visionnaire commerciale... L'appât du gain était plus puissant même que celui de l'amour... Et Pandora était l'associée idéale !

Elle enfile une paire de gants en peau de dragon et s'approche de l'espace de travail, rouvre le manuel sur la recette qu'ils tentaient de surpasser. « Mais dis-moi, qu'est-ce que tu sens avec l'amortensia ? Qui est-ce qui fait battre ton petit cœur d'artiste ? »

Qui avait dit qu'il fallait séparer plaisir et business ? Demetra adorait mettre ses dents sur quelques bons ragots juteux, qu'elle partageait ou non selon ses intérêts.

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andora afficha un sourire radieux en entendant Demetra approuver sa proposition. De par son ambition dévorante, elle aurait éventuellement pu avoir sa place à serpentard, mais cette ambition était sans doute la seule caractéristique qu'elle serait à même de faire correspondre avec la maison des vert et argent. Mais en tout cas, l'une comme l'autre pouvaient bien s'entendre dans les circonstances actuelles. Il ne fallait jamais se reposer sur ses acquis, sur ses lauriers. Il fallait toujours vouloir se dépasser, c'était ainsi qu'on parvenait aux plus grands progrès aux meilleures évolutions.

Pandora n'attendit pas davantage pour rassembler les ingrédients qu'il leur seraient nécessaires afin de les préparer. Elle avait aussi rajouté quelques nouveautés qui n'étaient pas dans la recette d'origine mais qui pourraient peut-être ajouter une plus-value à la potion. Certains ingrédients n'étaient pas vraiment utiles et ne serviraient qu'à donner plus de goût à la potion en question, d'autres constituaient autant d'ingrédients qui, aux yeux de la blondinette, faisaient immanquablement le sel d'une histoire de coeur épanouie. Quitte à façonner de l'amour de toute pièce, autant faire qu'il soit le plus équilibré possible, pas vrai ?

Pandora s'interrompit dans sa préparation quand elle entendit la vert et argent lui poser une question à laquelle elle ne s'était pas attendue. Elle dut prendre le temps de réfléchir. Elle avait plusieurs fois été en présence d'armotentia, et à chaque fois, il y avait une petite différence, à peine notable mais bien présente, dans les fragrances qui se dégageaient du philtre d'amour. Logique, on évoluait, nos sentiments et nos aspirations évoluaient aussi. Elle finit par répondre, un peu sincèrement. Elle n'avait pas de raisons de mentir.

-Moi je sens... le feu de cheminée, les feuilles mortes arrosées de pluie à l'automne, et... je crois que c'est de la fleur d'oranger.

Finalement, c'était très spécifique, mais oui, elle pensait que c'était la description la plus authentiquement proche de leur situation.

-Et toi alors ? dit-elle en s'attaquant de nouveau aux ingrédients qu'elle découpait avec une profonde minutie sur le plan de travail. Je serais curieuse de savoir ce qui est capable de t'émouvoir.

Demetra restait un vrai mystère aux yeux de Pandora, ce genre de questions pouvaient l'aider à mieux la comprendre, à mieux la connaître.

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