Je vais bien, tout va bien [pv Lily]

Lily était ravie de retrouver Poudlard et ses habitudes. Elle avait passé un été un peu étrange. Elle ne s’était pas imaginé qu’il lui semblerait aussi… vide en l’absence de Severus, mais c’était en effet le cas. Si au sein de l’école de magie, ils étaient loin de se voir tout le temps avant leur brouille (rupture amicale serait plus juste) – puisque Severus préférait consacrer son temps à ses amis crétins de Serpentard, ce n’était pas pareil durant l’été, où ils se voyaient presque tous les jours et pouvaient discuter longuement, des heures et des heures.
 
Cet été, donc, pas de longues conversations sur la magie et sur tous les sujets susceptibles de les intéresser tous les deux. Lily avait supposé que ce serait l’occasion de se rapprocher de sa sœur, et que l’absence de Severus dans les parages rendrait Pétunia plus ouverte à la conversation. Et des discussions avec son aînée, pour en avoir eu, elle en avait eu, on ne pourrait affirmer en revanche qu’elle en garderait un souvenir impérissable, loin de là. Ou alors un souvenir franchement désagréable.
 
Pas grave, Lily ne s’était pas laissée abattre, elle avait tout de même su apprécier son été, entre lectures, révisions (eh oui…), sorties en compagnie d’amis d’enfance, et un voyage en France organisé par ses parents qui lui avait fait un bien fou, lui permettant de sortir de chez elle et de voir autre chose, tout simplement, ce qui n’était pas du luxe.
 
Malgré tout, elle se sentait totalement bien à présent qu’elle était revenue, et l’une des personnes qu’elle avait été la plus impatiente de retrouver, c’était bien évidemment Mary, sa meilleure amie devant l’éternel.
 
Elle l’avait cherchée dans la salle commune, mais ne l’avait pas trouvée. Une de ses amies lui apprit qu’elle était partie à la volière. Lily aurait pu attendre qu’elle revienne, c’est vrai. Mais elle préféra aller la rejoindre directement. Ce ne serait pas une corvée. Elle aimait se rendre à la volière, même si ce n’était pas pour envoyer le moindre courrier. Il y avait les hiboux, la vue… exception faite des fientes, c’était plutôt agréable au bout du compte.
 

-Ah, voilà la plus belle !

Lily afficha un sourire amusé, mais par contre pas du tout convaincu. Et pour cause, elle ne s’était jamais trouvé belle, mais de la part de Mary, elle acceptait n’importe quel compliment.
 
"Arrête, tu commences à parler comme Potter", plaisanta-t-elle avec légèreté. Même si ce n’était malheureusement pas faux. Elle la prit brièvement dans ses bras pour la saluer comme il se doit. "Comment tu vas ?"

-Très bien, contente d'être de retour.

Le sourire de Lily s'agrandit. Elle se sentait rassurée, parce qu'elle voyait bien que sa meilleure amie était sincère. Lily admirait vraiment Mary pour cela : la capacité qu'elle avait de se distancier de sa douleur et de croquer la vie à pleines dents en dépit de tout ce qui lui était arrivé. Elle n'acceptait jamais de se morfondre, elle était un véritable rayon de soleil, et c'était vraiment agréable.

Même si parfois, Lily se disait que, ne lui en déplaise, Mary devrait juste craquer. Forcément, elle aurait le sentiment de se mettre à nu, forcément sa pudeur en prendrait un coup, mais ça lui ferait peut-être du bien. Malgré tout, Lily était loin de vouloir forcer les choses. Pour le moment, elle se réjouissait simplement de voir que Mary était de bonne humeur, contente d'être rentrée. Elles étaient deux dans ce cas. Elles allaient retrouver leurs habitudes, leur routine, et ça lui ferait définitivement le plus grand bien.

Je viens d'envoyer un hibou à ma mère, le topo habituel, pour la rassurer. J'ai presque des scrupules de la laisser toute seule.

Malgré tout, le propos de Mary se nuança de lui-même quand elle lui apprit les raisons de sa présence ici : Lily s'en doutait, Mary avait écrit à sa mère. Elle savait que c'était une sorte de rituel entre elles depuis la mort de Mr MacDonald. La mère et la fille se serraient les coudes, se soutenaient mutuellement. Elle pouvait comprendre que Mary n'aime pas l'idée de la laisser seule après deux mois passés ensemble.

Lily lui adressa un regard qu'elle ne voulait pas trop soucieux mais qui l'était bien malgré elle. Elle n'y pouvait rien. Elle se faisait du soucis quand elle entendait ce genre de choses. Elle savait pertinemment que ce n'était pas ce que Mary voulait. Mais elle n'allait pas faire comme si elle n'entendait pas ce que ses mots voulaient dire. Lily lisait entre les lignes. C'était comme ça.

"Comment elle va ?" demanda-t-elle donc, saisissant aussi l'occasion d'inviter sa meilleure amie à se confier, ce qu'elle estimait beaucoup trop rare. Elle n'avait pas envie de le lui reprocher, elle savait bien que ça faisait partie de son caractère, mais quand même, pour elle, l'échange, le dialogue, c'était important en amitié.

-C'est difficile à dire. Elle est pas forcément du genre à s'épancher sur ce qu'elle ressent, tu vois le genre.

Lily s'autorisa un sourire en coin qui voulait tout dire en guise de réponse. Oh oui, en effet, elle voyait le genre, et pour cause, elle en avait un specimen manifestes juste sous le nez.

La rouge et or savait que le caractère de sa meileure amie était ainsi fait, et elle avait renoncé depuis bien longtemps à la changer, mais tout de même, si on voulait accorder du crédit à l'adage "telle mère, telle fille", Mary et sa mère en donnait la possibilité : toutes les deux la même difficulté à mettre des mots sur ce qu'elles éprouvaient, toutes deux l'incapacité totale à juste... délaisser leur carapace.

Et encore, Lily savait qu'elle avait de la chance, en cet instant. Le simple fait que sa meilleure amie accepte de se livrer, de lui parler un peu, c'était déjà un immense pas en avant, et de toute évidence, ce n'était pas tous les jours que ce cas de figure se reproduirait. 

En attendant, Lily essayait de se mettre à sa place. Elle ne pouvait pas faire mine de savoir précisément ce qu'elle endurait. Avec ses parents, Lily avait toujours été transparente, ils ne se cachaient jamais rien. Le seul souci familial duquel elle pouvait se rapprocher, c'étaient les conflits constants qui, à ce jour, l'éloignaient de sa soeur, jusqu'à ce que, à un moment donné, elle ne soit plus en mesure d'y faire quoi que ce soit.

-En tout cas, elle va mieux, c'est sûr, mais je m'inquiète toujours un peu... je sais pas comment c'est pour elle quand je suis dans les parages.

Le sourire de Lily s'affaissa un peu. Elle comprenait combien ça devait être dur, d'être si loin et de ne pas être certaine de pouvoir agir en quoi que ce soit même en affichant la meilleure volonté du monde. Elle espérait que les inquiétudes de sa meilleure amie n'étaient pas fondées et qu'elles finiraient par disparaître. Difficile d'en être sûr malgré tout.

"Je suis sûre que le fait que tu lui écrives l'aide beaucoup, en tout cas", l'encouragea la rouquine en affichant un sourire apaisant. Elle ne pouvait rien faire de plus à cette distance de toute façon. Elle hésita... elle avait envie de pousser la discussion plus loin, mais elle avait peur de braquer Mary. C'était plus simple de passer à quelque chose de plus léger. "Et sinon, dis-moi, ça se passe comment avec Tilden ?"

Le sujet le plus lourd a été abordé, et Mary a eu le mérite de ne rien lui cacher, même si elle n'est pas non plus entrée dans les détails. Lily avait bien compris qu'elle n'en obtiendrait davantage de sa part, que ça suffisait comme cela.

Alors autant discuter de tout autre chose. Et le premier sujet qui lui venait à l'esprit était de ces sujets qui préoccupent forcément les adolescentes de seize ans. Mary était en couple. Cela avait toujours étonné Lily, d'ailleurs. Pas qu'elle puisse plaire aux garçons, au contraire, puisqu'elle était une très jolie fille, en plus d'avoir tout un tas d'autres qualités. Mais elle ne connaissait pas plus indépendante que Mary, et pourtant, elle la voyait souvent en couple. Avec Sirius avant, avec Tilden maintenant...

Et si elle n'était pas convaincue de son histoire avec Sirius, elle adorait en revanche voir Mary et Tilden ensemble, elle aimait la façon qu'il avait de réussir à la faire sourire dans tous les cas. Même si en matière de sentiments, son ex lui avait peut-être apporté davantage.

-Toujours aussi bien, je m'éclate avec lui, il est parfait pour moi, en fait.

Lily sourit, le mot était fort, mais elle connaissait Mary, elle voyait très bien où elle voulait en venir exactement. C'est vrai qu'il y avait de quoi les envier quand on les voyait ensemble tous les deux. C'était toujours léger, ils ne se prenaient jamais la tête.

Mais une fois de plus, Lily connaissait Mary, ce n'est pas parce que Tilden était "parfait" pour elle qu'elle l'aimait pour autant. La rouquine aurait été incapable de se mettre en couple avec un garçon pour lequel elle n'aurait que des sentiments amicaux, mais elle ne cherchait pas à se mettre à la place de Mary. Elle savait juste que sa meilleure amie gérait très bien la situation.

-Mais tu sais, c'est pas juste, si on doit parler garçon et qu'il n'y en a toujours pas un seul pour t'intéresser dans tout Poudlard.

Lily ne perdit pas son sourire, même si Mary marquait un point. Elle aimait se mêler des histoires de coeur des autres, mais sa vie sentimentale à elle était au point mort. Elle n'avait jamais eu de vrai coup de coeur, au mieux une innocente affection.

"Eh, j'y peux rien, moi", remarqua-t-elle, toujours souriante. "Et puis, tout le monde ne peut avoir le même succès que toi."

-Oh, c'est pas moi qui ai un admirateur pas du tout secret depuis des années qui essaye de m'avoir à l'usure.

Lily leva les yeux au ciel sans pouvoir pour autant contredire sa meilleure amie. Et pour cause, elle ne pourrait le faire sans une grande mauvaise foi. Même ceux qui s'intéressaient le moins à ce genre d'histoires ne pouvaient ignorer le fait que James courait après Lily depuis... disons un long moment.

Mais si il fallait réduire sa vie sentimentale à sa relation houleuse avec Potter, alors elles n'iraient pas très loin; Ceci dit, de fait, Mary avait tout de même raison... Elle avait, disons, un minimum de succès. 

-Rien de nouveau, alors ? Même pas une amourette de vacances ? T'aurais pu tomber sous le charme d'un beau Français, j'en sais rien, moi.

Merlin préserve Lily des amourettes de vacances, c'était le genre d'expérience qu'elle n'avait pas la moindre envie de vivre. De toute façon, la romance, ça l'intéressait de loin chez les autres, mais à titre personnel, elle ne courrait pas après. 

Mary n'aurait donc rien de croustillant à se mettre sous la dent. Mais elle ne devrait pas être si déçue pour autant, parce qu'elle devait s'en douter. Elles se connaissaient depuis longtemps. Elle aimerait dire qu'elles se disaient tout, ce n'était pas vrai parce qu'il y avait des choses que Mary ne savait pas lui confier.

"Tu aurais été la première au courant si ça avait été le cas", répondit Lily avec un fin sourire. Et elle pensait vraiment. Mary était toujours celle à qui elle confiait tout, et dans un cas de figure comme celui-là, elle se serait empressée de lui écrire à ce sujet, sans l'ombre d'une hésitation.

Mais il n'y avait rien à signaler. Elle lui avait bien envoyé une carte postale, très classique mais qui venait du coeur. Donc elle devrait se contenter du peu qu'elle avait, même si ce n'était pas forcément si croustillant que cela.

"Par contre, je t'ai ramené tout un tas de souvenirs de mes vacances, je les ai laissé dans la salle commune, je pense que ça va te plaire."

Elle serait bien plus à l'aise en lui parlant de ses souvenirs de vacances qu'en évoquant des histoires de coeur auxquelles elle était complètement étrangère. Même si elle n'était pas sûre que Mary serait aussi enthousiaste concernant les musées qu'elle avait visité.

-Pourquoi tu n'as pas commencé par là ?

La réaction de sa meilleure amie fit doucement sourire Lily. Oh, la rouquine connaissait bien assez Mary pour ne pas prendre la mouche ou autre. Elle savait bien que Mary n'était pas vénale, bien au contraire. Plutôt le genre à trouver plus de plaisir à offrir qu'à recevoir... Même si elle était humaine. Les cadeaux, ça faisait toujours plaisir à tout le monde.

Et au fond, Lily espérait bien, en effet, que son cadeau saurait parler au coeur et à l'âme de sa meilleure amie. Ce n'était rien de très onéreux, mais c'était en revanche personnel. Lily adressait toujours pour ses proches un temps et une attention qui lui apparaissaient impérieusement nécessaires.

 Je veux voir ça, tout de suite.

Voilà qui était une très bonne idée ! Lily n'avait pas la moindre raison de s'y opposer, en tout cas. Bien au contraire, même. C'est vrai qu'elle n'y avait pas pensé sur le moment, mais elle ne voudrait pas que ses précieux souvenirs de vacances se contentent de moisir au fin fond de son sac alors qu'ils étaient susceptibles de faire une heureuse.

Et puis, elle se disait qu'il n'y aurait absolument rien de mieux pour remonter le moral de sa meilleure amie. Mary était douée pour porter des masques. L'instant d'avant, un court instant, Lily avait entraperçu sa fragilité, ses doutes, ses angoisses. Il n'y avait plus rien de tout cela pour luire dans son regard, à présent. Rien d'autre qu'un enthousiasme franc et impérissable.

Elle était comme ça... Ce n'était pas de la comédie, pas complètement. Mary voulait être heureuse, alors elle se donnait les moyens nécessaires pour l'être, d'une façon ou d'une autre, peu importe les obstacles qui croisaient sa route. Malgré tout, l'ombre de l'inquiétude qu'elle ressentait pour sa mère restée chez elles sans qu'elle puisse en prendre soin et être sûre qu'elle ne cèderait pas à la solitude était encore présente. Si Lily pouvait la dissiper un peu avec un simple cadeau, alors elle en serait définitivement contente.

"Je savais que si je t'en parlais tout de suite, tu n'accorderais plus aucune attention à ce que je pourrais te dire autrement", plaisanta-t-elle avec un grand sourire. "Allez, viens."

Sans dire un mot de plus, Lily invita Mary à la suivre en dehors de la volière pour se rendre dans leur salle commune, agrémentant le trajet d'anecdotes sur son voyage en France. Elle était vraiment contente de l'avoir retrouvée.