Hatred is a cold fire, and it gives no warmth (Regulus)

Beth sentait la migraine poindre à des kilomètres à la ronde. La journée avait été extrêmement longue et s’était ponctuée par un cours d’Arithmancie qui, bien que passionnant, avait terminé de l’achever. La fatigue venait gratter un peu à la surface de son habituelle si parfaite apparence là où sa posture se faisait un peu moins droite sous le poids des lourds manuels transportés toute la journée et que quelques cheveux fous venaient s’échapper de son chignon improvisé, précairement maintenu en place par un simple crayon de papier. Les explications du Professeur McKinnon reléguées dans un coin de son cerveau, elle ne rêvait plus à présent que d’un bon repas chaud et de retrouver au plus vite sa couette. Etouffant un bâillement dans la paume de sa main, elle faillit ne pas se rendre compte qu’elle n’était pas seule dans l’étroit couloir qu’elle venait d’emprunter.

A la vue de la silhouette adossée au mur, son corps réagit automatiquement. Effacée la mine fatiguée, très vite remplacée par son masque de froideur habituel. Sa posture avachie était soudain bien loin, le buste droit, le menton haut à la manière des grandes dames qu’elle n’était pas vraiment. Regulus Black avait cet étrange pouvoir d’à la fois faire bouillir le sang dans ses veines et de lui donner l’impression de s’être prise une douche glacée. Elle ne pouvait pas le supporter. De ses rictus moqueurs à ses traits ciselés de parfait petit aristocrate, tout chez lui lui donnait envie de l’étrangler de ses mains nues. Beth se félicitait pourtant d’être quelqu’un d’extrêmement contenu. Elle n’avait d’ordinaire pas de mal à dissimuler son déplaisir derrière, dans le pire des cas, quelques remarques acerbes ou, au mieux, un petit sourire hypocrite. Avec Regulus, c’était différent : elle ne se faisait pas confiance à elle-même.

Inspirant puis expirant doucement, elle s’avança un peu plus dans le couloir, inconsciente d’avoir observé une halte à la vue du Serpentard. Ils étaient seuls et c’était à la fois une excellente et une très mauvaise nouvelle. Excellente, car elle n’avait aucune envie de subir en plus la présence de Rogue avec qui le plus jeune des Black semblait passé le plus clair de son temps, et très mauvaise parce que… et bien parce que ça signifiait qu’ils étaient seuls tout simplement.

Beth s’arrêta à quelques mètres du jeune homme qui, au choix, ne l’avait pas entendu approcher ou  se contentait tout bonnement de l’ignorer. L’agacement choisissant de surnager parmi toutes les émotions qui tourbillonnaient au plus profond de son être, elle croisa les bras sur sa poitrine et s’éclaircit bruyamment la gorge pour attirer son attention.

« Tu es sur mon chemin Black, fut tout ce qu’elle articula, plus glaciale que leur dernier hiver écossais. »

Douce espérance que celle de croire qu’il s’écarterait sans plus de cérémonie, stupidité peut-être même un peu. Mais au fond, elle savait qu’il ne la laisserait pas s’en tirer à si bon compte. Après tout, l’aurait-elle fait à sa place ? Et comme elle ne savait pas la fermer, la suite se bouscula à la sortie de ses lèvres sans presque demander son accord :

« Au cas où ton cerveau un peu lent aurait du mal à comprendre, ça veut dire bouge. »