On ne peut pas être fort tout le temps [pv Marlene]

C'

était parti de rien, d'un détail complètement anodin. Mary s'était rendue à la bibliothèque pour emprunter quelques livres (à la base, ce devait lui servir à ses révisions, mais elle s'était quelque peu égarée et avait finalement décidé de plutôt prendre de quoi se divertir), et quelque chose... elle ne saurait même pas trop dire quoi, un sentiment, une impression... qui l'avait saisie d'un coup. Elle avait pensé à son père, et elle s'était sentie fondre en larmes sans même avoir su d'où les larmes venaient. Mary détestait ça, elle détestait pleurer. Elle cachait ses larmes y compris à ceux qui lui étaient les plus proches, et pour cause, pleurer ne le ferait pas revenir, pleurer ne le lui rendrait pas.

Elle savourait la vie avec d'autant plus de volonté qu'elle voulait faire honneur à celui qui la lui avait offerte, qu'elle en connaissait la valeur. Elle ne se forcait pas à rire, à sourire... mais oui, des fois, ça ne suffisait pas. Et ces fois-là, Mary ne choisissait pas de se réfugier dans les bras de Tilden ou de trouver du réconfort auprès de Lily. Certes, ils étaient tous deux ceux qui en savaient le plus de ce qu'elle ne disait pas (avec Sirius, peut-être), mais elle n'avait pas envie de leur infliger le spectacle de sa tristesse. Elle n'avait pas envie de les voir s'inquiéter pour elle. Alors, le temps que la crise se résorbe, elle s'était réfugiée dans le seul endroit qui lui était venu à l'esprit.

Cela faisait deux ans qu'elle n'avait pas mis les pieds dans les toilettes des filles du deuxième étage. Et cette fois-là, c'était vraiment parce qu'elle souffrait d'un besoin trop urgent pour faire quelques mètres de plus. La compagnie affligeante de Mimi Geignarde l'avait largement dissuadée d'y revenir... Mais aux grands maux les grands remèdes... même si elle n'avait vraiment pas envie d'entendre les commentaires du fantôme qui chouine commenter son désarroi, loin de là.

Heureusement, une fois sur place, elle eut au moins le soulagement de constater que Mimi n'était pas là. Sans se soucier de mouiller ou salir le bas de sa robe (son apparence était de toute façon le cadet de ses soucis), elle s'assit à même le carrelage et s'adossa au mur le plus proche, les yeux fermés. Une inspiration, une expiration, il fallait évacuer les larmes et ressortir d'ici avec le sourire.

A moins d'être interrompue auparavant...

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M

arlene avait un bout de chemin à faire pour passer du cours de métamorphoses à celui de soins aux créatures magiques, et grognait un peu contre celui qui avait fait son emploi du temps sans penser au fait que passer du fond des cachots à l’autre bout du parc en dix minutes n’était vraiment pas pratique. Mais bon, au moins, ça lui permettait de faire un peu de sport, Marlene avait pris l’habitude de trottiner entre certain cours histoire de se maintenir en forme. Autant elle adorait jouer sur tous les tableaux autant ça devenait vite compliqué de tout gérer en même temps. Heureusement qu’Emmeline était là car, Marlene était tout sauf organisée ! Le temps qu’elle perdait à refaire ses notes tous les soirs, en s’aidant de celle de sa meilleure amie pour que sa pensée soit un peu plus claire…

…elle s’interrompt pourtant en tournant pour s’engager dans un nouveau couloir du deuxième étage lorsqu’elle voit une fille aux couleurs de Gryffondor passer en coup de vent, se précipiter dans les toilettes les moins populaires de toute l’école. Marlene fronce les sourcils et, tant pis si elle était pressée, décide de suivre sans attendre Mary.

La jaune et noir pousse doucement la porte, entrant avec une certaine appréhension, vu qu’elle n’avait pas particulièrement envie de rencontrer enfin Mimi Geignarde. Heureusement elle n’est accueillie que par bruit de l’eau qui fuyait… et d’un qu’elle reconnaîtrait n’importe où. Une respiration tremblante, les sanglots retenus douloureusement. Une situation qui lui était devenue bien trop familière.

Sans plus hésiter Marlene s’avance jusqu’à Mary, balançant sans la moindre délicatesse son sac par terre et s’agenouillant juste devant elle, genoux et cape traînant dans la flaque d’eau. « Hey, MacJolie. » Elle attrape simplement les mains de son amie, les serrant avec douceur et fermeté entre les siennes. Marlene était passée par là, y passait encore de temps en temps, et elle savait que la dernière chose que Mary voudrait entendre était « est-ce que ça va » ? Parce que non, ça n’allait pas, pas du tout, et elle ne voulait pas qu’elle se sente forcée de lui répondre par un mensonge. Rien de pire que d’avoir un témoin à sa vulnérabilité, que quelqu’un soit là quand on craquait… Elle savait, tout ça, parce qu’elle vivait la même chose, jour après jour… Alors Marlene ne pouvait pas la laisser toute seule, ne pouvait pas rester les bras ballants alors qu’elle pouvait aider.

Voir Mary, comme ça, ça lui faisait mal, ça réveillait la pas si vieille douleur à peine enfouie sous le protego qu’elle s’était elle-même construit. L’adolescente s’avance un peu et pose son front contre celui de son amie. « T’as pas besoin de te retenir, pas avec moi, tu sais. » murmure-t-elle avec une voix douce et en serrant un peu plus ses mains.

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M

ary sursauta légèrement quand la porte s'ouvrit, craignant qu'on ne la découvre dans cette situation. Elle ne voulait pas que qui que ce soit la voie ainsi, et s'il devait s'agir des élèves de Serpentard qui n'avaient de cesse que de la persécuter, elle savait bien qu'elle allait passer un très sale quart d'heure. Mais quand elle leva ses yeux embués, elle reconnut Marlene à travers un voile de larmes. Marlene, la seule personne qu'elle autorisait à la voir dans cet état... Même si elle se le serait épargnée malgré tout. Dans l'idéal, elle aurait préféré que personne ne la voie ainsi. Mais ce qui était fait était fait, Mary ne pouvait pas faire illusion, prétendre que les apparences étaient trompeuses, faire mine de n'avoir cédé à aucun accès de faiblesse. La situation parlait d'elle-même. Et elle devait avoir l'air singulièrement pacifique.

Mary était de toute façon incapable de bouger, de dire ou faire quoi que ce soit. Marlene prit ses mains dans les siennes, la rouge et or baissa les yeux sur elles et les serra aussi fort qu'elle put. C'était plus simple que de la regarder en face, de voir sa douleur se refléter dans ses yeux. Elle n'avait pas besoin de se retenir, avec elle, parce qu'elle savait exactement ce qu'elle vivait, elle savait précisément ce que ça faisait. Ce qui ne voulait pas dire qu'elle n'avait pas envie de se retenir, de faire comme si de rien n'était... Malheureusement, l'émotion avait pris le dessus, et maintenant que les vannes étaient ouvertes, elle était juste incapable de les refermer.

Elle hocha la tête, elle tremblait de tous ses membres. Et finalement, sans rien dire, elle se serra contre Marlene, sanglota sans plus réussir à s'arrêter, les larmes lui obstruaient la gorge, elle avait du mal à respirer. Il fallait qu'elle se calme, mais elle n'y arrivait pas. Il lui fallut du temps, beaucoup de temps, pour réussir à reprendre une respiration un peu normale, pour s'écarter légèrement afin d'essuyer les larmes qui mouillaient son visage d'un revers de manche.

-Désolée pour ça..., parvint-elle à articuler d'une voix rauque.

Elle savait que Marlene ne lui en voudrait pas, ni ne souhaiterait qu'elle s'excuse, mais elle détestait très sincèrement le spectacle qu'elle donnait d'elle en cet instant.

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C

a serre le cœur de Marlene, de voir son amie comme ça. Elle n’était pas le genre de personne qui pouvait ignorer les malheurs des autres et compartimenter, au contraire. La Poufsouffle était bourrée d’empathie, et si elle avait pu trouver un sort pour balayer toutes les peines et les soucis, elle l’aurait fait. Mais ce n’était pas si simple, la magie ne pouvait pas tout résoudre, comme elle l’avait douloureusement compris lorsque ses parents lui avaient été arrachés.

La mort était définitive, magie ou pas magie.

Ce qui était loin d’être un soulagement, que ce soit sans recours ! Ne pouvoir rien faire, pour empêcher les choses de tourner mal. Ne pouvoir rien faire pour essuyer les larmes de son amie Mary –certes, techniquement elle pouvait le faire au sens propre, mais ce n’était pas ça qui l’empêcher de fondre à nouveau en sanglots plus tard quand il n’y aurait vraiment personne pour la surprendre.
Elle était bien placée pour le savoir.

Marlene serre fort son amie dans les bras, fort, fort, pour lui assurer qu’elle n’était pas seule. Elle frotte sa main dans son dos, la poitrine douloureuse à entendre et ressentir ce chagrin. C’est communicatif, alors elle ferme ses yeux emplis de larmes sans cesser ses gestes, elle aussi elle voulait pleurer, c’était presque impossible de se retenir face à l’état de Mary… Mais elle se retient, parce que c’est ce qu’elle faisait, tout le temps, et parce que Mary avait besoin d’elle.
Il faut un long, long moment avant de se calmer, et ça ne vient même pas à l’idée de Marlene qu’elle est en train de sécher les cours, elle avait plus important sur le feu.

Elle cligne vivement des yeux lorsque Mary s’écarte. Elle lui laisse un peu d’espace mais continue de frotter doucement son dos, histoire de l’aider à reprendre une respiration plus tranquille. « Tu rigoles ? T’as pas à t’excuser. Jamais, pas pour pleurer quand tu es triste ! » Marlene à une mine sérieuse, un ton presque autoritaire. Elle se calme un peu, juste après. Elle était à fleur de peau parce que ça la touchait, sincèrement, profondément ; mais elle ne voulait pas bousculer Mary non plus. « Tu m’as même pas mis de morve dessus, t’as rien à te faire pardonner tu vois. » qu’elle rajoute avec un léger sourire, histoire de faire descendre la tension, avec beaucoup de classe bien sûr. Ahem. « Tu veux en parler ? » De ce qui l’avait poussée à bout… Dès fois, ça faisait du bien. Dès fois, c’était trop dur. Mais au point où elles en étaient autant que Mary finisse de vider son sac et jette tout aux orties (ce que Marlene ne savait pas si elle aurait été capable de faire.).

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M

arlene tenait à son adresse le même discours que Mary tiendrait à n'importe qui qui se trouverait dans cette situation et prononcerait les mêmes mots. Elle savait, au fond, qu'elle n'avait pas à s'excuser d'être malheureuse, ou de craquer de temps en temps, et que personne n'allait en vouloir pour cela... mais faites ce que je dis, pas ce que je fais, comme on dit. Elle avait beau savoir tout ça, elle ne se raisonnait jamais quand on en arrivait à son propre sujet. Elle avait le sentiment qu'à chaque fois qu'elle affichait sa faiblesse, elle faisait souffrir inutilement les personnes autour d'elle. Elle ne voulait pas attirer la compassion ou la pitié... et en même temps, elle ne voulait pas faire semblant non plus...

Elle émit un petit rire qui, un peu sanglotant, ne ressemblait pas à grand-chose quand la jaune et noir lui répliqua qu'elle ne s'était même pas mouchée dans sa robe de sorcière, donc pas de quoi s'excuser. Bon... Elle retrouvait tout doucement le sourire, l'air de rien, ça lui faisait du bien. Elle n'aimait pas être malheureuse. Qui aimait ça ? Si ça ne tenait qu'à elle, elle sourirait à chaque seconde que Merlin faisait sans se poser plus de questions. Mais rien n'était jamais aussi simple, malheureusement...

Mary fut tentée de donner à son amie la réponse habituelle quand Marlene lui demanda si elle voulait en parler : elle ne voulait jamais en parler. Ou non, ce n'est pas qu'elle ne voulait pas en parler, c'est qu'elle ne voulait pas infliger ça aux autres. Elle savait que plusieurs de ses proches, Lily en tête, n'attendaient que cela de sa part : qu'elle accepte de se livrer, et ils ne verraient pas le fait de l'écouter comme un fardeau... Oui mais... Elle n'y arrivait quand même pas. Se taire avait l'air juste... plus simple. Et en même temps, elle avait envie de vider son sac. Et Marlene pouvait la comprendre. Marlene était comme elle. Elle n'aurait pas pitié d'elle, elle se contenterait d'entendre ce qu'elle disait pour ce que c'était.

-C'était rien de spécial... Elle marqua une légère pause. Est-ce que ça t'arrive aussi... ? Tu sais, comme une impression de déjà-vu. T'es bien, t'y penses pas du tout, et, tout à coup, y a un bruit, une odeur, un son, n'importe quoi qui te rappelle...

Ceux qu'elles avaient perdus.

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[size=13]arlene ne s'attendait pas forcément à une réponse, quand elle demandait à son amie si elle souhaitait parler de ses peines. Ni forcément à ce qu'elle vide son chaudron d'un coup en confiant tout ce qu'elle avait sur son cœur. Il fallait dire que la Poufsouffle, de son côté, ne gérait pas trop dans la partie confier ses sentiments de façon plus ou moins lyrique. Elle se sentait plus forte quand elle avait l'air forte, quand elle laissait les regards de pitié s'écraser contre sa falaise de détermination et de colère. La colère, oui, c'était sa bierraubeurre, on disait que c'était mal, que c'était nocif, tout ça, mais la colère l'aidait à avancer.

Mais Mary ne rejette pas en bloc sa proposition... Marlene attrape ses mains et l'écoute parler, sans la presser ou quoi, elle sait à quel point ça peut être difficile... En plus, la manière dont Mary décrit ce qui l'a poussé aux larmes... La plus jeune se sent un peu mal à l'aise, un peu dos au mur. Elle sourit un peu faiblement à Mary ressent la même chose, bien trop souvent. Et elle la comprend, Merlin, comme elle la comprend. Ca craint, d'être orpheline.

« Ouais... Tout le temps. » Elle soupire, grimace un peu. Forte, c'est ça. Ils lui manquaient tellement. « La dernière fois que ça m'est arrivé, j'ai quitté la classe en courant. C'était à cause du parfum. Une fille a utilisé le même parfum que maman... Enfin je crois. » Elle déglutit. Pas facile d'en parler, pas facile de se confier, mais c'est donnant donnant. Elle serre un peut plus les mains de Mary, si c'est pour se donner de la force ou lui en donner, elle ne sait pas trop. « Enfin, si ça se peut ce n'était pas le même, c'est peut-être juste ma tête qui me joue des tours, tu sais ? Parfois je me dit qu'on a tellement envie qu'ils soient encore avec nous qu'on s'imagine des choses. » Elle regarde Mary dans les yeux, essaie de lui faire comprendre qu'elle n'est pas toute seule. « Tu penses pas ? »

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ary esquissa un léger sourire quand Marlene lui confirma que ce sentiment de vide et de détresse, qui arrivait presque de nulle part, elle le ressentait aussi constamment. Elle n’avait pas souhaité à la jaune et noir de connaître cette impression à ce point déplaisante, mais en même temps, elle avait été sûre qu’elle serait capable de se mettre à sa place, c’était d’ailleurs parce qu’elle l’en savait capable qu’elle lui en parlait si librement, ce qu’elle ne faisait pas avec la plupart. L’adolescente ne pensait pas que tout le monde vivait le deuil de la même manière, mais elle voulait croire qu’il y avait des traits communs à des souffrances comme celle-ci. Et c’était rassurant. Mary ne voulait pas que Marlene souffre, mais elle appréciait dans le même temps, sans doute égoïstement, de ne pas être la seule à souffrir. Elle savait que la Poufsouffle pouvait très exactement comprendre ce qu’elle endurait, ce qu’elle traversait, et ça avait une immense importance à ses yeux.

Marlene lui apprit que quelque chose du genre lui était arrivé en plein cours et qu’elle avait dû quitter sa salle de classe. Un parfum porté par une élève qui ressemblerait à s’y méprendre à celui que portait sa mère. Bien sûr, bien sûr, ça ne pouvait être qu’une impression. En fait, c'était même presque sûr. Mais c'était le genre d'impression si tenace, sur le moment si évidente, qu'il est impossible de la rationnaliser. On a beau savoir que ça n'a pas vraiment de sens, on a beau se dire qu'on est dans le déni, les pensées les plus intelligentes et logiques attendront toujours le dernier moment pour s'imposer à vous. Et en attendant, il n'y avait rien à faire si ce n'est endurer la situation... en se demandant si ça s'arrêterait un jour. Et plus le temps passait, plus Mary se disait que la réponse à cette question était malheureusement évidente : on en guérissait jamais vraiment.

-Si, c'est sûr, répondit Mary en hochant doucement la tête. Des fois, je me lève le matin, et c'est comme si mon père était jamais parti. J'arrive à m'imaginer qu'on s'est parlés la veille, qu'il sera avec moi le soir, que... Le cerveau humain est super mal fichu.

Et d'un autre côté, ce n'était pas complètement désagréable, comme impression. Enfin, sur le moment, ça ne l'était pas. Puis quand on réalisait la cruelle vérité, elle venait vous claquer à la gueule comme un coup de fouet. Et là, ça faisait mal.

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